vendredi 25 novembre 2011

Candeur du commencement.


3 août 2011. Hier. Il y a cent ans. C’était quand déjà ?

Je me réveille ce matin entre les quatre murs de mon nouveau chez-moi. Notre nouveau chez nous, car Bambi fait partie de l’aventure. De la fenêtre juste au-dessus du lit, j’aperçois la clarté du ciel barcelonais. Celui sous lequel je vais avoir le bonheur de me réveiller maintes et maintes fois. Ce même azur que mon grand-père contemple depuis 86 ans et qui parfois lui arrache un soupire irrité :  « Je suis fatiguée de ce ciel tout bleu, je veux du gris, de la pluie et des nuages !».

Je me lève et chemine pieds nus sur le sol frais dans la cuisine. Ma nouvelle cabane est un vieil appartement barcelonais qui revisite un peu les notions de confort pendant l’hiver grâce à son absence de chauffage. Mais nous sommes encore en août et je suis dans l’euphorie de l’arrivée, celle où l’on s’émerveille de tout et surtout de rien, comme on le ferait au début d’un nouvel amour. Comment est-ce possible de s’abîmer dans une ville qui fleure bon la gaieté.

En buvant mon premier café d’expatriée, me parvient par la fenêtre grande ouverte l’allègre pépiement de mes nouveaux voisins, s’adonnant à leurs occupations matinales.

Le silence est troublé par les bruits de vaisselles, de portes qu’on ouvre ou qu’on ferme, de chasses d’eau qu’on tire, de nourriture qui frit dans la poêle, de discussions dont on saisit plus ou moins le sens en fonction de l’éloignement.
En fait, il n’y a pas de silence. Il y la vie, eux, et moi…

Oh ! je les aime déjà ces sans visages rassurants !

Je jette un dernier œil aux cieux. Au tout premier jour de ma vie de résidente et non plus de touriste, je trouve dans cette infinité sans troubles un sentiment de paix. Quoi qu’il arrive, et même quand ça ira mal, tout ira bien. Je sais que les choses ne seront pas aussi fluides que cette coulée bleue qui me couve.

Le futur me donnera raison, d’ailleurs.

Ah ! vraiment, il n’y a rien de plus parfait que la nouveauté. 





dimanche 13 novembre 2011

Agathe et son blabla reprennent du service.

Moi qui voulait voulait m'investir dans un blog d'écriture à un rythme honorable, c'est raté.

Mais mieux vaut tard que jamais, comme dirait l'autre. Alors me voilà.

Je n'ai pas le courage/la force/l'envie de passer des heures à vous emmener avec moi sur les routes de mon voyage au coeur des Balkans. Il y a comme un manque de maturité, de temps et de motivation qui pèche.

Mais l'envie d'écrire est toujours là, mais elle est comme une savonette que j'essaye de retenir entre mes mains.

Il faut dire que depuis la ponte de mon dernier billet, il s'en est passé des choses.

J'ai quitté ma Picardie pour la séduisante Barcelone.

Une ville de choix pour les paumés comme moi. La plupart des gens que je rencontre sont dans cet entre-deux, en quête de vie, de projets. La cité est comme une gigantesque soupe de rêves et d'espoirs mal définis.

La crise, qui n'arrange rien les choses, fait de mes errances un trait de caractère propre à quasi tous les jeunes d'ici, qu'ils soient natifs ou étrangers.

Peu des jeunes peuvent dire où ils seront dans 6 mois, ou un an. Nous sommes des bourgeons en éclosion. Il y a dans l'atmosphère un parfum de Carpe Diem. J'aime ce Vivre au jour le jour, mais c'est parfois plus difficile à appréhender que ce que je pensais.

Je pense néanmoins que c'est un bon endroit pour faire le point, et pour se frotter aux aspérités de la vie. Le soleil et le dynamisme aident, et les mentalités sont moins jugeuses.

Alors me voilà, tâtant de la Crise en veux-tu en voilà, prêt à affronter les emmerdes du système avec la vaillance d'un petit soldat.

La route est longue mais en vaut la peine, alors si vous le voulez bien je vous embarque sur une autre, mais je promets de finir le récit de mon voyage en Serbie si tôt que j'aurai acquis un peu de maturité et de courage...


samedi 23 juillet 2011

Visite nocturne



Pour suivre le Journal de voyage dans les Balkans depuis le début, c'est par là : Introduction - Episode 1 - Episode 2 ...


* * * * * * * * 



Je me redresse d’un coup, comme un zombie qu’on ressuscite :

À mes côtés, Bambi fulmine et répète en litanie une série d’insultes dont je saisis à moitié le sens. Je le vois se débattre avec hargne pour enfiler ses chaussures et sortir de la tente au plus vite. Quand je lui demande une explication, il s’exclame :
-         Ce fils de pute regardait dans la tente !
Mon coeur vient s’écraser contre ma paroi thoracique.

 * * *
A notre arrivée, et une fois le prêtre parti, Bambi et moi avions installé notre campement, choisissant avec soin une zone plate pour plus de confort, loin des nids d’insectes et à l’abri des arbres qui parsemaient le terrain.
Si les environs possédaient une âme toute bucolique, l’hôtel voisin, en revanche, faisait tâche dans le paysage. C’était un de ces bâtiments des années 70, haut et franc, dont la peinture claire ne parvenait pas tout à fait à maquiller l’austérité. L’intérieur était encore pire : les boiseries bas de gamme et les tapisseries, sans doute jamais remplacées depuis la construction, suffoquaient l’ensemble de l’édifice pourtant très vaste.
Nous nous étions offert le luxe d’une étape au restaurant de l’établissement. La salle à manger était à l’image du reste : démesurée, haute de plafond et gâtée par la même décoration cafardeuse. Une odeur écœurante de friture flottait dans l’air, et les cuisines ne cessaient d’apporter, dans une petite salle adjacente, des plats débordant de viande et de poissons frits. On préparait peut-être un évènement pour le lendemain, ce qui expliquait la présence sur le terrain d’un chapiteau de réception près duquel nous nous étions installés.
Alors que nous aspirions à faire valser nos papilles, la ripaille était en parfaite adéquation avec la dégaine du lieu : triste et sans saveur. Une véritable insulte à la péninsule balkanique toute entière.

C’est donc l’estomac en deuil que nous nous sommes faufilés à travers l’obscurité jusqu’à notre tente, une de ces ces “old school”, surmontée d’un petit filet d’aération sur la pointe. Il m’avait fallu bricoler, pour nous protéger des intempéries, une sur-couche hermétique en agrafant à l’extérieur, au moyen d’épingles à nourrices, la housse de mon sac de couchage.

Avant de dormir, je vérifie cependant que l’ensemble tient la route et m’engouffre sous la toile.
Il n’est pas bien tard pourtant, à peine 21h30, et il fait déjà noir. En Serbie, la nuit tombe tôt, et je crève d’ennui à l’idée d’aller me coucher à l’heure où mes potes picards n’en sont encore qu’à l’apéro.
Pourtant, une fois emmitouflée dans mon duvet, vaincue par le froid, je me laisse gagner par le sommeil.
Mais c’est sans compter avec Bambi : au lieu de poursuivre le revival de nos treize ans révolus façon colonie de vacances, frétillant dans nos sacs comme deux chipolatas dans une poêle trop chaude, voilà qu’il se met à se tracasser pour des broutilles.

Plus tôt, depuis le pont, nous avions aperçu quelques promeneurs circuler sur le sentier qui longeait la rivière, et à côté duquel nous étions installés. Nous n’étions bien sûr pas les seuls à profiter des joies champêtres. Mais moi, je suis juste comme ces enfants qui ont cette conviction que ce qu’ils ne voient pas n’existe pas. Sous une fine toile ou sous ma couette, c’est la même chose : le monstre/serial-killer/fantôme ne viendra pas m’attraper. Pas sûr que mon amoureux partage mon bon sens cartésien...

Alors au lieu de lutter en vain pour trouver le sommeil, il enfile ses chaussures et se risque au dehors. L’air glacial, et l’humidité sournoise qui émane de l’eau décourage mon instinct d’aventurière : je m'assois, emmitonnée dans mon sac comme un bombyx dans son cocon, tandis qu’il se tient debout de l’autre côté de l’ouverture.

- Tu vas attraper froid! Reviens! je couine.
Il hausse les épaules, et regarde au loin, derrière la tente :

- Non. Il y a un mec là-bas, je ne rentre pas tant qu’il ne part pas !
- Un mec? Quel mec? Il fout quoi?
- Rien, il est debout. Je crois que ce con nous observe... lâche-t-il en s’accroupissant. Peut-être que c’est quelqu’un de l’hôtel, le prêtre a demandé à la patronne de garder un oeil sur nous.
Quand Bambi se relève, il me souffle que l’homme a changé de place : il se tient désormais à moitié dissimulé dans les buissons qui frangent l’eau. Je lui marmonne qu’il s’agit sans doute d’un de ces jeunes croisés un peu plus tôt au restaurant. Peu convaincu, il fait mine de ne pas m’entendre, et se borne à arpenter le périmètre ostensiblement, comme pour signifier à l’individu qu’il le voit, et qu’il ne bougera pas.

Je jette un oeil dehors et aperçois un type qui traverse le terrain et disparaît dans le chapiteau.
- Tu vois ? Les cuisines préparaient des montagnes de bouffe : ils doivent organiser un truc pour demain... Un mariage ou je ne sais trop quoi. Bambi, rentre s’il te plait. dis-je en retournant m’allonger.
Il cède, mais par précaution, s’engouffre dans la tente armé d’un bout de bois assez gros pour terrasser un lion. Son visage affiche un sourire coupable. Je moque gentiment sa paranoïa qui me parait un poil exagéré.
Et chaque fois que je m’évertue à laisser le marchand de sable faire son boulot – et il se montre particulièrement tenace ce soir  –, Bambi réduit mes efforts à néant en m’assenant de menus coups de coude dès que le moindre bruit vient perturber la sérénité des environs. Sa frousse envahit peu à peu l’espace clos. Mais mon envie de ronfler est si puissante que je me rendors. Lui, au contraire, ne cesse de s’éclipser, muni de sa lampe de poche et de sa matraque improvisée. Ses tours de guet commencent à me porter sur les nerfs : de compréhensive, je deviens excédée. Je refuse que son angoisse ne vienne me contaminer et bousiller une nuit qui sera, quoi qu’il arrive, inconfortable à cause du  froid.

Enfin, je réussis à lui faire entendre raison. Bambi me rejoint à regrets, et nous finissons par nous endormir. Soudain, ses invectives explosives, à mille lieux de sa pondération habituelle, m’arrachent pour de bon de ma léthargie :

- JEBEM TI MATER!

C’est dans l’incompréhension la plus totale que je me lance à sa suite dans ce froid agressif, tandis que la phrase maudite me martèle la cervelle : Il regardait à l’intérieur.  

Qui ça “il”? Et comment? La tente était pourtant fermée...
« Par le haut ! » me crie Bambi qui tourne dans la nuit, au comble de la nervosité, à la recherche de cet ennemi invisible qui se paye sa tête.
Alors je jette un oeil à la cime de la tente. Ma dernière vérification m’avait prouvé que le filet était couvert convenablement, et que le vent ne pouvait pas décaler ma sur-couche. De toute façon, il ne soufflait qu’une discrète brise qui faisait tout juste chuchoter les feuillages.

Pourtant, un des coins de la housse est retourné.  
Je me penche davantage, et l’examine de plus près. Le malaise qui planait me tombe dessus comme un vautour sur sa proie :

Quelqu’un a retiré une des épingles...

vendredi 1 juillet 2011

Un prêtre bon(i)menteur

Le stop, je n’apprendrai ça à personne et surtout pas aux habitués, c’est souvent le meilleur moyen d’avoir une véritable image d’un pays. Aucun conducteur ne se ressemble, tous présentent des caractères et vécus différents. C’est la joie de finir, au gré de la chance, dans une voiture que tu ne pourras jamais te payer, ou dans un vieux tacot pourri, ce qui est souvent plus drôle.


Autant vous dire que lorsque je me suis retrouvée avec ma bière entre les genoux, dans la vieille Mercedes d’un prêtre orthodoxe, j’avais carrément l’impression d’être projetée dans un univers parallèle.

Nous venions de quitter Jagodina, notre deuxième étape, et voulions nous rendre dans un coin isolé pour y visiter un monastère. C’est dans une épicerie de bord de route que nous avons fait sa connaissance. Je l’avais trouvé un peu sévère de prime abord, sans doute bluffée par sa barbe blanche et sa grande robe noire, à la manière d’un Gandalf du côté noir de la force. J’ai d’abord cru qu’il me mangerait toute crue, mais force m’a été de constater qu’il était sociable et savait même manier l’humour, d’après les traductions sommaires de mes interprètes. Et puis non seulement il nous proposait de nous conduire au terminus, mais en bonus, il nous offrait l’hospitalité sous son propre toit.
J’ai sincèrement déploré, de prime abord, la barrière de la langue qui m’empêcherait de m’entretenir avec ce singulier personnage tellement gentil qu’il distribue des carambars aux petits n’enfants. Ma déception s’est écourtée lorsque celui-ci m’a déclaré solennellement que « les pires pêchés de la terre sont le fondamentalisme musulman et le communisme ». J’ai eu une petite pensée émue pour la bibliothèque de mon paternel où Marx et Trotsky figurent en bonne place. Je me suis d’ailleurs bien gardée de dire à notre cher bonze que le royalisme qu’il chérissait tellement ne m’apparaissait pas non plus comme inattaquable, pour rester polie.
En même temps, quand tu es paumée au milieu de nulle part, tu te gardes bien d’entrer en conflit idéologique avec celui qui pourrait te larguer sur le bas côté de la route, et où tu auras éventuellement la chance de te faire prendre en stop après une semaine ou deux, par une des rares voitures qui s’aventure dans le coin. D’ailleurs je ne suis pas partie en voyage pour débattre religion avec qui que ce soit.

Au moins, nous avons pu visiter sa jolie petite église, où Bambi s’est vu plus ou moins forcé à embrasser l’icône à l’entrée, pour éventuellement chopper aux passages les bactéries de tous les fidèles du coin. Nous avons également pu admirer son (hideux) portrait tout juste fini qu’il accrocherait non pas dans son église, mais chez lui, pour le plaisir de son seul regard. Pour la leçon d’humilité, on repassera.

Mais je suis un peu mauvaise langue, parce qu’au fond je lui suis reconnaissante de nous avoir baladés dans des endroits totalement délaissés, et parce qu’en descendant au sud, le paysage commençait à prendre de très beaux reliefs. A perte de vue s’étendaient des collines hardies et verdoyantes. J’étais partagée entre émerveillement et apaisement, ce spectacle me faisait du bien.
« La nature serbe est bénie » a-t-il déclaré, et pour une fois je ne pouvais qu’abonder dans son sens, même si nous ne partagions pas tout à fait la même notion du mot bénédiction. 
Je me suis laissée bercer par la Merco qui cahotait sur la route tortueuse pendant que Bambi faisait la discussion, curieuse de savoir à quoi pouvait bien ressembler le Home sweet home d’un prêtre orthodoxe. Luxueux ou modeste et épuré ?

Je ne l’ai jamais su, en fait, parce qu’au lieu de nous amener dans son antre comme il nous l’avait garanti, le voilà qui nous abandonne aux abords d’un motel en pleine nature :
« Je connais les propriétaires, vous pourrez planter votre tente sur leur terrain ! »

Malgré notre étonnement, je suis soulagée : sur le plan spiritualité, notre directeur de conscience et moi n’étions pas vraiment sur la même longueur d’onde. Mais surtout, nous sommes bien trop emballés à l’idée de pouvoir utiliser pour la première fois notre tente et rentabiliser l’achat de sacs de couchages tous neufs. L’once de déception (tout de même) que j’avais pu nourrir s’est effacée quand j’ai vu à quoi ressemblait notre endroit pour la nuit.

L’idée de se lever au petit matin avec la rivière Resava ruisselant à nos pieds procurait déjà un petit goût de paradis. Et nous étions à seulement un kilomètre du monastère de Manasija. Tout était parfait, donc...



Et le prêtre d’ajouter : « Je préfère vous savoir ici, au moins vous serez en sécurité.»



Pour l’intuition divine, on repassera aussi…

La photo est prise depuis l'emplacement de la tente.

Les alentours, si paisibles...


Photo prise du pont.

mercredi 29 juin 2011

Bienvenu(e)s à bord...



Celui qui sait d'où vient l'aurore qui se lève, 
Ouvre ses yeux noyés d'allégresse et d'amour, 
Il reprend son fardeau que la vertu soulève 
S'élance, et dit " Marchons à la clarté du jour! " 
                                                            
                                                        Alphonse Lamartine.


C’est un peu ce que j’ai pensé en quittant Vrsac, la ville de Bambi, le point de départ de notre Tournée Balkanise.

Il était tôt. Très tôt. D’ailleurs, même le reste du monde sommeillait encore. L’aube avait inondé les nuages d’un fabuleux camaïeu de rose. Une vision vue et revue qui fait mouche à chaque fois. Sauf que je n’ai pas le talent de Lamartine et que ma pensée s’est résumée en un : « Putain c’est troooop beau ! »

Car oui, j’ai vu dans ce ciel époustouflant une ébauche de promesse, annonciatrice de jours heureux et de moments palpitants qui viendraient alourdir ma boîte à souvenirs psychique. Quoi de plus magique que d’être au début de sa vingtaine, d’avoir tous ses neurones, et de partir découvrir une partie des Balkans avec son sac en guise de maison ?

En fait, j’ai surtout naïvement cru que le soleil, cette charogne, serait de la partie.
Ben en fait, non.

Parce qu’en arrivant à Smederevo, première étape de notre épopée fantastique, quelques 60 km plus loin (le bout du monde en fait), le ciel était gris comme un immeuble communiste.
-          Je n’y crois pas, explique Bambi aux deux gilets dont j’avais du me recouvrir, normalement pendant le mois de mai en Serbie, tu te ballades en t-shirt.
Mes gilets n’ont pas répondu, et moi non plus, parce que j’étais du genre flapi. Flapie par le climat qui me rappelait un novembre picard, par le manque de sommeil (empaqueter nos trucs la veille à la dernière minute c’est bien notre genre) et surtout parce que, misère ! La ville m’est apparue plutôt mocharde…

Grisée par le ciel, mais déjà pas franchement colorée à la base, même son imposante - et grise, on ne change pas une équipe qui gagne - forteresse n’a pas réussis à m'en faire garder un souvenir inoubliable. Histoire de feeling, je présume, même si le bastion vaut le coup d'oeil.



A droite, le Danube.


Fin septembre, la ville y organise un spectacle historique.

En fait je crois qu’une fois projetée, j’ai réalisé l’ampleur de la tâche. Parce que je venais de me rendre compte qu’on comptait rejoindre Zagreb avec chacun 15 kilos sur le dos, et surtout parce qu’il nous est rapidement apparu que l’organisation du voyage était proche ou égale à zéro. Il avait fallu choisir entre confort et aventure, et la deuxième option avait semblé plus drôle.

Mais là, entre nous, je ne rigolais plus : j’avais les pétoches. Les pétoches que tout soit aussi gris que Smederevo, de ne pas pouvoir porter ma maison, le fameux sac que j’idéalisais dans le bus, alors qu’il reposait dans la soute à bagage, loin de mes épaules. J'avais bien évidemment peur de ne pas avoir la capacité physique, et surtout la patience d’affronter les petites épreuves qui allaient bien évidemment se mettre en travers de la route.

Bien sur, je me suis trompée et fort heureusement le reste du voyage n’a pas été aussi morose que notre entrée dans le monde des routards. 

D’ailleurs, ce n'est que deux jours plus tard, alors que nous quittions Jagodina pour nous perdre dans la nature, que notre conquête de l’est a commencé à vraiment devenir palpitante...

mardi 31 mai 2011

Absence

Alors que je me voyais fortement resolue a entretenir ce blog, mes plans sont tombes a l eau.

J ai traverse toute la Serbie et la Bosnie jusqu a Dubrovnik en stop, et me voila a Split, avec seulement deux posts au compteur sur Le Bagou d Agathe.

La verite est que l acces internet s est revele plus que merdique, et qu en ecrivant a la va vite, je multipliais les fautes, et des idees trop vagues. De plus, depuis que j ai depasse la frontiere serbe, et specialement depuis que nous sommes arrives en Croatie, les choses sont un peu plus lourdes a raconter, du fait de la recente guerre, et j aimerais aborder le sujet sereinement, ce que je suis incapable de faire en n ayant jamais acces a internet plus d une heure par semaine.

Je n abandonne donc pas l idee de vous raconter mes aventures balkanises, et aussi partager des impressions, et surtout DES PHOTOS!!

Je rentre en France le 13 juin, et je serai bien plus tranquille pour vous transmettre tout cela avec le meilleur choix de mots possible, plutot que de vous livrer un fatras de ressentis qui n aurait de sens que pour moi, car je reste toujours dans l optique d unl travail d ecriture.

Un peu de patience donc, et toutes mes excuses! :)


jeudi 12 mai 2011

Entre Enfer et Paradis.

Huit jours seulement, j ai l impression que ca fait un mois qu on est partis. Ca parait si familier, et si etrange a la fois. J ai l impression de me sentir bien a peu pres partout et de faire preuve d une capacite d adaptation que je ne me connaissais pas.

Une certaine force, aussi, a trimballer mon sac comme un escargot sa maison. Chaque homme ou garcon que nous rencontrons me le portent parce qu ils pensent que c est trop lourd pour moi. C est gentil, et bien attentionne, mais un poil enervant aussi parce que quand il n y a personne, je marche, et je fais meme des pas de danse improvise sur le bord de la route pour faire rigoler les chauffeurs et leur donner envie de s arreter.

Parlons en du stop. Je pense que je me souviendrai de presque tout le monde pendant longtemps. Du chauffeur turque qui parlait serbe comme une vache espagnole (et nous le turque comme une chevre croate), aux deux mineurs qui se sont improvises guides de leur region pour quelques heures.

Ce matin encore, nous avons eu une chance extradordinaire.

En quittant Nis, la ville la plus importante de la partie sud, ce matin, je crois que nous avons leve notre pouce 3 minutes avant qu un vehicule ne s arrete. Il etait conduit par un kosovare albanais, qui vivait en Slovaquie et avec qui je me suis entretenue en espagnol. J ai pu realiser que, serbe ou albanais, au Kosovo ou pas, par ici on est extremement fatigues des magouilles politiques. Pas mal de gens rangent les rancoeurs dans leur poche et preferent la communication.

Lorsque nous sommes descendus, nous avons remis nos sacs sur nos dos bien reposes de notre sejour a Nis (les photos ne sont pas de moi) et nous sommes remis en marche en direction de Prolom Banja, une station thermale assez reputee dont l eau est vendue a travers tout le pays.

Apres 20 metres, un homme sur le bord de la route, 71 ans et toutes ses dents, avec un air de vieil acteur americain, nous demandent ou nous allons et propose de nous y conduire.

Une demi heure plus tard, nous etions a la terrasse de notre la maison privee ou nous allons passer la nuit, avec deux grands meres serbes ayant vecu a Paris durant plus de 20 ans. L une d elle a de gros problemes aux jambes mais galope avec sa canne comme si elle avait mon age, rigole un peu, blague beaucoup et a un caractere pour le moins bien trempe. Lorsqu elle parle le serbe, je ne la comprends pas mais rigole quasiment tout le temps parce que son visage, pas tres beau, vit par ses expressions cocasses.

Aujourd hui je peux dire qu on a eu le cul bordel de nouilles, parce qu en arrivant a Nis nous avions mis 5 heures pour faire 80 kilometres dans le froid et le vent, il faut bien que la roue tourne de temps en temps. Cela dit je pense tout de meme que nous avons de la chance de maniere generale. Chaque jour quelqu un, quelque part, nous offre son aide. Ce genre de voyage fait au moins comprendre que la solidarite n est pas morte, et ca, ca fait pas de mal de s en rappeler dans ce monde de brute.

Je n ai plus beaucoup de temps, et ce billet n a pas un grand interet en soit mais j avais envie de le partager. La prochaine fois ce sera un peu plus croustillant peut etre.

Je vous raconterai notre viree en vieille Mercedes en compagnie d un pretre orthodoxe pas tout a fait orthodoxe, ou encore comment nous avons fini avec deux lyceennes dans une fete foraine et une soiree serbo-beauf franchement marrante pour moi et tout a fait terrible pour Bambi.

Pour finir, je ne vais pas vous mentir, le paradis n existe pas, et la Serbie ne fait pas exception a la regle, alors pour que vous puissiez vous moquer un peu, vous trouverez ci dessous LE TUBE du moment et qui represente en general la musique que je dois me farcir depuis 8 jours. Et encore, 8 jours c est relativement raisonnable, quand on sait que Bambi subit cela depuis bientot 28 ans. Et apres on veut baptiser Jean Paul II!! Les martyres ne sont pas la ou l on croit... Le port de boules kies est fortement recommande avant ecoute.






En parlant d enfer, demain, c est LA que je vais. Beh oui, j allais quand meme pas finir sur une note aussi fausse. Finalement, c est quand meme un peu le paradis! :)))



Vous en reprendrez bien un chouia ??

Voici un billet qui remonte au 3eme ou 4eme jour de voyage. Les claviers serbes n ont pas d accent ni d apostrophes dignes de ce nom, donc desolee pour leur absence!


Trois jours de voyage et deja tant de choses a dire que je ne sais pas par quoi commencer.

Je pourrais, pour commencer, vanter l accueil des serbes. J ai discute avec une grecque le premier jour qui m avouait penser que si on accueillait bien en Grece, les serbes gagnaient la compet de l hospitalite haut la main!

Ici, pas moyen de repartir d une maison l estomac vide. Les meres serbes, baties du meme ciment que les pretendues meres juives, marocaines ou italiennes, douteront toujours de la sincerite de votre "Non merci, vraiment je n ai pas fin!", lance avec ferveur. Pour elles, la verite est bien plus simple : si vous prononcez ces mots, c est que vous etes timides, et n osez pas reclamer.

A aucun moment l idee que vous n ayez VRAIMENT aucun appetit (pour de vrai, croix de bois croix de fer si jmens....) ne leur traverse l esprit.

Ainsi, l expression "Quand y en a plus, y en a encore" peut s appliquer a merveille a votre estomac en Serbie.

L autre jour par exemple, nous etions invites chez un jeune lyceen ravi de nous accueillir et soucieux de bien le faire. Il nous propose donc a plusieurs reprises si nous souhaitons manger, mais etant deja en phase de digestion d un burek sa mesom avale quelques heures plus tot, je refuse poliment MAIS fermement.

Alors que je pensais naivement avoir remporte la bataille, la mere de notre hote penetre dans la chambre et lance a la volee un "Ajde, ajde!!" (Allez allez!!) avec la conviction d un general en faction, le genre de chose ou tu sens qu il n y a pas a negocier. Bambi et moi nous sommes leves d un seul homme comme deux sales gosses pris un flagrant delit de je ne sais quelle betise.

C est donc en degustant cet excellent sarma que j ai pu a nouveau tester l elasticite de mon estomac.

A cela s ajoutent les extra crepes offertes au restaurant, ou bien les bieres par un patron d epicerie en bord de route, ou, plus insolite tout de meme, par un pretre orthodoxe.

En bref, soyez tranquille, je ne mourrai pas de faim (ni de soif d ailleurs) demain.

D ailleurs demain, c est omelette au bacon pour le petit dej.

ARGH!!!


lundi 2 mai 2011

Vous avez dit Serbie?


Quand j’ai décidé d’aller Serbie pour la première fois, je me suis confrontée à un panel plutôt intéressant de réactions. J’ai eu droit à « Chouette, un voyage ! » mais aussi « Tu me ramènes Novak Djokovic en cadeau-souvenir ? » ou encore « En Serbie ??? Quelle idée ! » et enfin « Quoi ? Mais t’as pas vu Hostel ? »…

Et il faut que je vous avoue la vérité : si je n’avais pas rencontré un joli serbe aux cils longs comme des ailes de papillons pour m’appâter, la Serbie serait restée parmi la liste des pays dont je me contrecarre ou pour lequel je nourris de fausses idées et de gras préjugés.

La raison est simple : quand j’étais petite, je voyais ma mère frémir d’indignation devant le journal télévisé à cause des exactions de Milosevic. Pour moi, la Serbie et le dictateur, c’était une seule et même chose, et un serbe était, par définition, un nationaliste, donc on ne peut pas dire que ce soit vraiment appétissant.
Ensuite parce que ce que j’aurais pu apprendre d’intéressant et d’un peu objectif, c’était pendant les cours d’histoire au lycée. Et entre nous, le conflit yougoslave tu t’en tamponnes le coquillard quand t’as quinze piges, t’as d’autres choses à penser, comme tes parents qui te « saoulent grave » ou Thomas de la 2nde B qui est TROP mignon.

En grandissant, je ne peux pas dire que cela ait vraiment changé. Le souvenir même de ce pays s’est presque effacé de ma mémoire, parfois vaguement ravivé par Goran Bregovic et ses trompettes joyeuses (que j’adore).

Alors quand j’ai débarqué à Belgrade pour la première fois, autant dire que je ne m’attendais à rien. Voir au pire, mais ce serait exagéré parce que je ne suis quand même pas aussi bornée.

Bambi, celui aux yeux-ailes-de-papillons n’érige pas son pays en religion, comme plein d’autres que j’ai pu rencontrer. C’est grâce à sa vision et la leur, plutôt neutre et un peu désabusée que j’ai pu comprendre mieux, et surtout ressentir. La Serbie recèle des trésors insoupçonnés, mais se traine une réputation encrassée dont elle peine à se défaire. Quant a la promotion touristique, elle est quasi nulle : vous en voyez beaucoup des pubs dans le métro du type : La Serbie, ça m’émoustille ?

Il m’est même arrivé, en faisant des recherches sur le web, que le Sacro-saint Google me propose Syrie au lieu de Serbie.

Demain, Bambi et moi prenons la route avec des sacs à dos qui font quasi deux fois notre taille (il faut dire aussi que notre hauteur n’est pas notre qualité première), pour un voyage à travers les Balkans. Ca me permettra ainsi d’alimenter à mon tour le sujet sur la toile comme le font déjà (et très bien) d’autres voyageurs.

Je n’ai pas envie de laisser ce blog à l’abandon, alors au lieu de raconter des histoires (mon inspiration joue à cache-cache en ce moment), je vais donc le transformer momentanément en Carnet de voyage, et qui sait, peut-être que si vous ne connaissez pas déjà, vous viendrez y faire un tour un de ces jours ?

mardi 1 février 2011

Vertige


Elle se précipitera dans le vide.

Avec le courage et la grâce de ceux qui n’ont plus rien à perdre, elle se jettera au vent. Elle prendra son élan et courra, comme l’athlète qu’elle ne sera jamais.

Elle emplit ses poumons de grandes bouffées d’air frais, la cage thoracique gonflée à fond pour pallier l’apeurement. Elle s’élance. Une course courte, faite de grandes enjambées, muscles bandés, jambes tendues à l’extrême pour ne pas s’arrêter.
Lorsqu’elle sent le bord du rocher, elle jaillit vers le ciel.
Là, dans la pérennité de l’instant, elle reste suspendue, figée dans l’éther, avec le vent comme seule compagnie, qui siffle à ses oreilles et caresse son corps.

Puis elle s’incline. Plus lourde qu’une pierre, elle fend le vide. Se laisse étreindre par le vertige qui chambarde ses entrailles. La stabilité du rocher est déjà loin au dessus d’elle : les dés sont jetés.

L’eau la reçoit sèchement, comme une gifle, l’aspire dans son bourdonnant silence, l’englouti avec brutalité dans ses profondeurs troublées. Elle ne résiste pas à la puissance de sa propre charge. Elle soumet son être à la houle qui la tourmente, fusionne avec ces flots qui l’éreintent, inquiète soudain de perdre l’énergie nécessaire pour remonter. Mais une saccade vigoureuse suffit à la conduire jusqu’à la lumière. L’adrénaline de la chute a ravivé jusqu’au moindre de ses muscles, électrisant l’entièreté de sa chair : elle est heureuse. Heureuse et soulagée. Un rire la bouleverse, incontrôlable.

Quelques mètres plus haut, le rocher sur lequel elle était restée paralysée pendant près d’une heure la toise de toute sa hauteur. Mais il lui semble insignifiant à présent : la peur de sauter s’est envolée dans la chute. Ses amis qui avaient moqué son appréhension un peu plus tôt lui sourient :

Tu vois ? Ce n’était pas si terrible finalement !





mercredi 26 janvier 2011

Rencontres inopinées

Le bar était surpeuplé, et ça tombait mal, car Jeanne détestait la foule.
« J’aimerais bien savoir comment tu réussis à profiter de l’ambiance ! La musique est gueularde, et je te parle même pas de l’impossibilité de lever le coude sans estropier ton voisin ! » S’exaspéra-t-elle auprès de son amie, Fanny qui ne semblait pas partager son jugement.

Dans ce genre de circonstances, sa petitesse devenait pénible. Elle faisait partie de ces victimes de tous les jours qui subissent, dans le métro, les exhalaisons d’individus à l’hygiène douteuse, le nez collé à leurs aisselles. En soirée, ça n’avait rien d’une ballade de santé non plus : elle finissait toujours par se retrancher dans un coin isolé pour ne pas se faire aplatir par des malabars sans scrupules. Fanny - et ses dimensions hors normes - ne manquait jamais d’air, elle. Lassée d’attendre un mojito qui ne viendrait pas la réconforter dans son infortune, Jeanne s’extirpa tant bien que mal de cette embuscade festive, et s’échappa vers la sortie.

A l’extérieur, le froid était presque insoutenable, mais elle préférait bien ça à la fournaise à laquelle elle venait d’échapper. Elle s’emmaillota dans son manteau, et sortit une cigarette de son sac. Les endroits grouillant de gens la plongeaient à tous les coups dans un état d’énervement frôlant l’hystérie. C’était plus fort qu’elle, et dans ces circonstances, pas moyen  de décompresser. Elle savait bien qu’aussi longtemps que ses amis voudraient s’attarder sur les lieux, sa soirée serait cuite !

Du moins c’est ce qu’elle en avait conclu avant que ses yeux ne se posent sur ce ravissant trentenaire, posté à deux mètres d’elle. Lui ne l’avait pas remarquée, toute concentration requise par son Blackberry, sourcils plissés, pas très vêtu malgré le froid. Il était foutrement canon, avec cette barbe courte et bien entretenue qui venait aguerrir le paisible regard bleu.
Jeanne, qui n’était pas du genre bégueule, pesa le pour et le contre : Ca se joue, ça se joue pas ? Oh et puis zut !

« Excusez-moi, vous auriez du feu ? » S’enquit-elle.
Bien entendu, son briquet à elle roupillait peinard dans le fond de sa poche et n’attendait que d’être utilisé, mais elle avait décidé de miser sur les bons vieux classiques. Après tout, il n’y avait pas quantité de manières d’aborder un mec, si ? Au moins, avec ça, elle était à l’abri du ridicule que pouvait provoquer de louables - et bien souvent casse-gueules - initiatives en matière de drague. D’ailleurs passé une certaine heure, la timidité n’était pas une convive estimée des coins fumeurs.

Poli, le jeune homme rangea le téléphone dans sa poche et alluma la cigarette de Jeanne. Il y avait un côté un peu pompeux chez l’individu qui ne parvint pas à la décourager : le sourire, lui, était engageant malgré tout.

Ils amorcèrent alors un semblant de discussion. Un peu comme avec un chat errant, il fallait bien l’amadouer avant de l’attraper. Elle lui confia ainsi son aversion pour les lieux saturés, et lui et son mètre 85 opinèrent, pleins de compassion pour le petit bout de femme qui se lamentait : « Je comprends, ça semble pénible. ».

-          Et sinon, tu fais quoi dans la vie ? interrogea-t-il.

Elle tira une bouffée de sa cigarette pour se donner un peu de contenance et lâcha, avec une pointe d’ironie :
-        Je travaille pour mon oncle, il a une boîte d'événementiel et il m’exploite pour faire le sale boulot !
-          Tu sais ce qu’on dit : il n’y a pas de sot métier ! déclara-t-il pour la consoler.
-          Oui, et puis bon, c’est au black, alors ça paye pas mal, j’me plains pas !
-          Au black ? Eh ben…
Elle rit :
-       Oui bon, c’est un peu salaud, venant de la famille, mais comme je t’ai dit, la paye est pas dégueu, et puis c’est toujours mieux pour lui de ne pas s’emmerder avec des histoires de paperasse ! Tu connais la chanson !

Pour sur, qui ne la connaissait pas ! Et au fur et à mesure qu’elle parlait, elle remarqua qu’il n’en perdait pas une miette. Un groupe de gens qui s’amassait devant la porte de l’établissement entravait leur discussion, et il l’invita à s’asseoir sur le parapet qui longeait les fenêtres pour être plus au calme. Elle s’assit, et il interrogea avec intérêt :
-          Une boîte d’événementiel tu dis ? Et le nom de la boîte, ça s’appelle comment ?
Son affabilité l’invitait à être plus bavarde : ce n’était pas tous les jours que les mésaventures de son job à la con trouvaient une oreille attentive ! Ca la changeait de la condescendance que pouvaient exprimer certains à son encontre.
-          Baltik Event ! fanfaronne-t-elle, pas peu fière de s’improviser promotrice. C’est pas très loin d’ailleurs, boulevard Henri IV ! Tu veux aller voir notre site ?
-           Et comment !
Et pouf, le Blackberry fit son grand retour, et le jeune homme nota avec minutie tout ce qu’elle lui disait. Il était peut-être un de ces promoteurs à la recherche de bons tuyaux, et elle se réjouit d’avance d’avoir déniché un client potentiel.
-          Merci beaucoup ! lâcha-t-il lorsqu’elle eut achevé son exposé.
Il remit d’un geste prudent le fragile appareil et frotta ses mains engourdies par le gel pour les réchauffer
Enhardie, Jeanne lui offrit une cigarette en guise de deuxième round, et en expirant la première latte, demanda à son tour :
-          Et toi alors, c’est quoi ton boulot ?
Il se leva et s’étira un peu trop longuement avant de se pencher sur elle avec un sourire en coin.
Il marqua un petit temps d’arrêt, et c’est curieux, mais tout à coup elle le trouvait presque vilain, son bel inconnu...
-          Moi ? Je suis contrôleur fiscal.